J'en ai déjà parlé, ici en Suède, les sorcières, c'est à Pâques. Grimpées sur leurs balais, munies de l'immanquable théière de cuivre et généralement d'un chat, elles volent jusqu'à Blåkulla, colline mythique dont l'emplacement reste secret. Là, entourée de démons et de leurs collègues, elles dansent, ripaillent et apprennent moult secrets. Les mentalités suédoises envers les sorcières ont bien changé. Il y a environ un siècle, les gens avaient coutume de tirer des coups de feu en l'air la nuit de Pâques pour descendre les éventuelles voyageuses volantes. Plus récemment, il y a entre 10 et 50 ans, les gens s'envoyaient des cartes postales toutes plus mignonnes les unes que les autres pour se souhaiter joyeuses Pâques - et les maris se montrent bien souvent fort complaisants envers leurs bonnes femmes trifouilleuses de sorts. Les mêmes qui tiraient en l'air envoyaient pourtant depuis des siècles leurs enfants, déguisés tous genres confondus en petites sorcières aux joues bien rouges, sonner à toutes les portes du voisinage pour obtenir des bonbons - tradition très semblable à celle de l'Hallowe'en américain donc, mais pas à la même saison. Ces jolies traditions de Pâques sont hélas peu à peu en train de disparaître en Suède. Tous les jeunes adultes de ma génération (entre 20 et 30 ans) ont été dans leur enfance, au moins une fois, déguisés en petites sorcières de Pâques pour aller sonner aux portes. Mais des trois Pâques que j'ai passées en Suède déjà, même en excluant cette année 2020 si étrange d'un point de vue social, je n'ai jamais vu le moindre enfant déguisé dans les rues. Quand et surtout pourquoi la tradition s'est-elle perdue ? Est-ce à cause de l'Hallowe'en américain qui gagne du terrain et semble ainsi faire "double-emploi" ? Non, ça me semble une réponse trop facile. Les traditions de Noël (Jul en suédois), aussi très marquées pendant des siècles, sont aussi en train de disparaître. Les jeunes gens déguisés qui carillonnaient aux portes, faisaient des farces et chantaient les chansons traditionnelles ne se rencontrent plus. Ne restent des traditions locales de Jul que le bouc géant édifié à Gävle (incendié une fois sur deux, toujours selon la tradition), les chansons de Noël, Sainte Lucie bien sûr et puis les dessins animés du 25 décembre, que toute la population suédoise s'enferme pour regarder. J'ai l'impression qu'il s'agit simplement du désenchantement général de notre monde, ainsi que de la perte de liens sociaux des différents groupes de personnes au profit d'une individualité exacerbée. Les étudiants d'Uppsala huchent encore à la pleine Lune, ceux d'Helsinki continuent de se baigner dans les fontaines, ceux de Sundsvall de se déguiser en pirates à la Valborg (1er mai), mais pour combien de temps ? Pour ma part, je me suis énormément amusée à réaliser mes photos de sorcière suédoise (Påskkärring) en route pour Blåkulla et les ai envoyées à tous mes amis, suédois ou non, sous forme solide (cartes) ou informatique. Et ferai de même l'an prochain, et l'année suivante, et ainsi de suite.
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Pensées et réactions sur bien des choses liées à la spiritualité. Peut-être beaucoup de critiques. Mais aussi beaucoup d'admiration.
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Décembre 2021
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